Le mouvement hip-hop au Gabon

Avec une population jeune âgée de 15 à 54 ans, le Gabon apparaît clairement comme le pays d’Afrique Centrale où le hip hop est un moyen privilégié de communication pour toucher la jeunesse. Cet article mettra donc en lumière l’expression artistique la plus courante du hip hop : le rap.

Ba’Ponga, artiste de rap originaire du Gabon. Photo : DR

En guise d’illustration, nous nous souvenons des élections générales de 2009, où des artistes célèbres tels que Hay’oe, Kôba Building, Ba’Ponga, Jojo, Tina et bien d’autres avaient décidé de soutenir Ali Bongo Ondimba, candidat à la présidentielle, lors de sa campagne.

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Effectivement, un hymne intitulé « Parole aux jeunes », avec pour refrain « On te suit », a été créé pour l’occasion dans le but d’encourager les jeunes à voter en faveur du candidat Ali.

Après cet hymne, des concerts gigantesques et gratuits ont eu lieu, rassemblant sur la même scène les meilleurs artistes de la musique urbaine gabonaise. Cependant, cette idée de combiner le hip hop avec une campagne électorale n’était pas nouvelle.

En 2005, pour encourager les jeunes à s’inscrire sur les listes électorales en vue des prochaines élections, le label Eben Entertainment a lancé une campagne de communication musicale intitulée « Bouge ton vote ».

Cela démontre amplement l’intérêt que les politiciens portent au mouvement hip-hop, en particulier au rap, afin de rassembler les jeunes.

Pour saisir ce phénomène, il est nécessaire de revenir aux années 80, période où le hip hop, né à New York dans le South Bronx dans les années 70, commence à se diffuser à travers toute l’Amérique et ensuite dans le monde entier.

L’Afrique n’échappe pas à cette vague révolutionnaire qui englobe principalement le rap, le DJing, le breakdance, le graffiti et le beatboxing.

L’émergence du style musical hip-hop

L’arrivée de ce mouvement au Gabon est marquée par Klaus, également connu sous son vrai nom Gervais Mpouho.

Klaus, qui était proche de feu le président Omar Bongo, dirigeait le pays sous un régime de monopartisme. C’est dans le XVIe arrondissement de Paris, où il vivait, qu’il a fondé le 12 juin 1989, avec ses frères et amis, le groupe « Gunthers Family », s’inspirant du célèbre groupe américain Public Enemy, en tant que fervent adepte du mouvement rap.

En tant que chef du collectif, il est à l’origine de l’écriture et de la composition de ses propres morceaux. C’est sous le nom de V2A4 (Vivre avec audace et ambition) que ses chansons telles que « Révolution africaine » (où il critique ouvertement les régimes dictatoriaux africains, dont celui du Gabon), ainsi que leurs tubes « Un message de V2A4 » ou encore « Les filles », ont vu le jour. Ces morceaux ont été vendus au Gabon et en France sous différents formats tels que le vinyle, la cassette audio et le maxi 33T.

Ce groupe de rap sera le pionnier dans la vente de ses créations au Gabon.

En 1990, des tensions politiques sont apparues. Cela a conduit à la tenue de la conférence nationale du 23 mars au 19 avril 1990 à Libreville, qui a été un événement politique majeur en Afrique centrale et sur tout le continent.

Cela a abouti à la fin du monopole politique, à l’établissement du multipartisme et à l’acquisition des libertés démocratiques essentielles pour le peuple gabonais. Le secteur audiovisuel va alors s’étendre. De nombreuses stations de radio privées et locales émergeront, ainsi que des home-studios.

Ce sont donc tous les éléments nécessaires pour populariser le mouvement rap qui était déjà en effervescence dans les lycées et à travers les concours de rap qui se tenaient dans un endroit appelé Cabaret des Artistes.

En 1991, la station de radio panafricaine Africa n°1 soutient le rap gabonais grâce à son émission « Les Rappeurs de la côte-ouest » animée par Arcade Mbanangoye.

L’émission contribuera de manière significative à l’essor du hip-hop gabonais et sera suivie par des programmes tels que « Hit-parade Marlboro » sur Africa n°1, « Canal Evasion » sur RTG1 (aujourd’hui Gabon Télévision) et « Bhat Power Show » sur TéléAfrica avec Régis Massimba.

Les formations de rap se multiplient et quelques-unes, comme Siya Po’Ossi X, se distinguent.

Siya Po’ossi X, dirigé par Lawana, a acquis une renommée en 1991 grâce à l’album Seyougam, dont la chanson « L’idiot de la radio » critiquait l’impartialité des présentateurs radio.

Publié en 1997, l’album Mapane Groove Act 1, avec son titre emblématique « To kill Lawana », a consolidé son succès en dénonçant la corruption et les brutalités policières.

En 1998 sort l’album Mapane Groove Act 2, comprenant le célèbre morceau Vive la vie.

L’ère dorée du rap au Gabon

En 1995, le collectif Buk Drama émerge, regroupant notamment Movaizhaleine, Raboon, Acid Gangsta, Dikam et Poetic Gangsters. Un an plus tard, ils sortiront l’album compilation « Le Matcha ».

En 1997, la sortie de la première compilation de hip-hop gabonais, Bantu Mix Ess-Pou-Are, voit le jour grâce au studio d’enregistrement Kag Pro, dirigé par l’arrangeur Georges Kamgoua.

Le regroupement comprenait Block PF, Naneth & Eveline, Hay’oe, New skul, BWV (maintenant connu sous le nom de For B Lani), Professeur T, NBK, Encha’a & Duru, Monee et Verena.

Bantu Mix représentait ainsi la toute première compilation majeure du rap gabonais, délivrée en format CD et cassette, suivie d’un spectacle en direct intitulé « Bantu Live ».

En 1998, « Conscience Noire » d’Yves Saint l’Amour, Titus et Freddy captivent tous les classements. Yves Saint l’Amour se lance en solo en 2001, dévoilant un album de sept titres parmi lesquels « Show Gars » brillera comme un joyau.

Le Professeur T émerge en tant que précurseur de la scène ragga muffin.

Secta’a, déserteur du Clan V de V2A4, émerge. En 2000, ils publient un maxi-single nommé « Où les âmes se figent », suivi d’un album du même titre en 2006. Cette création leur permettra d’accéder aux festivals Africains Africarap (Togo), Rap Aussi (Guinée Conakry), et Waga Hip Hop (Burkina Faso).

  1. « Amour puis Vie de haine » de Raaboon domine les ondes, faisant sensation dans les médias radiophoniques et télévisuels. Le groupe, adulé par le public, parcourt les plus grandes scènes musicales, récoltant les lauriers de la réussite.

Raaboon se métamorphosera en Raaboon Phénoménal aux côtés de Tate Kombil, Bibalou Nganga, Frank Ba’Ponga, Amour Clara et DJ Zangbeto. Pendant ce temps, Movaizhaleine réinvente le classique Aux choses du pays en compagnie d’autres artistes gabonais : Pierre-Claver Akendengué et Annie-Flore Batchiellilys.

La renommée de ces ensembles donnera lieu à une série de concerts dans le pays, notamment ceux de Movaizhaleine entre 2003 et 2011.

En 2001, la seconde compilation du hip-hop gabonais, intitulée « Mémoire Vive », a été réalisée par Didier Dingalt Ping, célèbre pour avoir dirigé les clips de stars africaines telles que Papa Wemba ou Koffi Olomidé.

Le collectif Hay’oe se cristallise avec Massassi, Barabbas, Shaalah, Maggeintha et Andromedha en 2001, et ils dévoilent leur opus « Accent Grave Aigu ». Cependant, le morceau phare de l’album, « La Chronique », subit la censure du Conseil National de la Communication pour son contenu jugé trop provocant, en désaccord avec les normes sociales du Gabon.

En 2007, sera lancé l’opus Gestation 3.5, suivi par les débuts en solo de Massassi et de Maggeintha.

En 2003, voit le jour le rap traditionnel avec des figures marquantes comme Communauté Black ou Teck B.

En 2003, a également marqué l’émergence de la maison de disques Eben Entertainment. Unique, percutante, innovante, sont les mots qui caractérisent le mieux les approches marketing de cette étiquette.

Jamais auparavant le hip-hop n’avait été aussi lucratif. La société de disques a rassemblé sous le label Eben Family les talents de Ba’Ponga, Kôba, Secta’a, Cherokee, Masta Kudi, La Fuenté et Nephtali, ouvrant ainsi la voie à un style de hip-hop commercial, divertissant, accessible à tous, moins politiquement engagé mais toujours résolu à dénoncer les maux de la société gabonaise.

Moins considéré ou moins significatif dans d’autres nations africaines, le hip-hop exerce une empreinte sur la scène musicale du Gabon.

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