Les musiques traditionnelles de la Guinée-Bissau s’inspirent de l’héritage ancestral des divers groupes ethniques formant le pays. Elles sont intégrées dans divers rituels locaux ainsi que dans des célébrations populaires telles que le grand carnaval annuel.
Les musiques traditionnelles en Guinée-Bissau (Photo) : marilia.sp.gov.br
Introduction
Petit État de l’Afrique de l’Ouest, la Guinée-Bissau, du nom de sa capitale Bissau, est entourée au nord par le Sénégal, à l’est et au sud par la Guinée (Conakry), et à l’ouest par l’océan Atlantique.
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Habitée par une diversité de groupes ethniques (plus d’une trentaine, tels que les Manjaques, Mandingues, Mancagnes, Balantes, Diolas, Baïnouks, Badiarankés, Soussous, Bagas, Papels, Landoma, Bayots, Tendas, Bijagos, Peuls, Floups, Pkumels, Koniakes, Nalus…), la Guinée-Bissau se distingue par une riche palette musicale, illustrée par des danses, des rythmes et des instruments traditionnels.
Caractéristiques
En s’inspirant des cultures ancestrales, les mélodies et danses traditionnelles de la Guinée-Bissau se distinguent par leurs particularités sonores, leurs instruments uniques, leurs tenues colorées (souvent des batiks faits à la main) ainsi que par l’utilisation de masques sacrés (représentant des requins, des taureaux, des vaches, des hippopotames, entre autres).
Syncrétisme
Mêlant les pratiques animistes avec différentes convictions religieuses telles que l’islam, le christianisme, et le catholicisme, la Guinée-Bissau a forgé un syncrétisme religieux et culturel unique, souvent invoquant le pouvoir surnaturel pour entrer en communication avec les ancêtres ou pratiquer la musicothérapie. Un exemple emblématique est le « ndëpp » des Lébous et des Wolofs du Sénégal, une danse extatique et trance, accompagnée de rythmes de tambours, utilisée pour soigner les troubles psychologiques des individus.
Les mélodies ancestrales
Ancienne terre sous le drapeau portugais, imprégnée des mélodies lusophones, en particulier du « fado », la Guinée-Bissau présente une richesse de styles musicaux traditionnels, transmis de bouche à oreille au sein des familles ou au sein des « mandjuandades », ces associations qui ont pour vocation de préserver la mémoire culturelle dans les hameaux et les quartiers urbains.
Chaque groupe social et chaque tranche d’âge possèdent leurs propres airs et danses authentiques : le « Koussoundé » (une danse balante), la « brosca » (une autre danse balante), le « campouni » (une danse exécutée par les femmes Bijagos), le « cabaro » (une danse des hommes Bijagos), le « Kaniokan » (une danse des aînés Bijagos), le « brassa » des Ondames du Centre, des Mancagnes et des Manjaques (ou Manjacks) du nord, le « nalou » du sud ou encore la danse « tinatina » (ravivée par des troupes lyriques traditionnelles…
D’autres motifs rythmiques, incluant certains empruntés des pays voisins, sont également pratiqués et diffusés, en particulier par l’Ensemble Folklorique National Netos De Badim : « doundoumba » (la danse des hommes forts), « toupousésé » (originaire des Peuls), « Soli » (une célébration des garçons circoncis et des filles excisées), « yankady » (une danse de séduction), « mané » (lié aux Balantes), ou encore « kebendo », « zaillé »…
Les mélodies et danses traditionnelles se joignent à chaque étape de la vie : les mariages, les baptêmes, les rituels d’initiation appelés « fanado », les obsèques, les heures de travail ardu, ou simplement les réjouissances dans les villages et les quartiers.
Il convient de noter que des groupes de danse et de musique traditionnelles sont parfois sollicités par des politiciens lors de leurs campagnes électorales.
Les instruments classiques traditionnels
Dans ces genres musicaux, tels que le « brassa » (pratiqué à travers le pays), on trouve divers instruments traditionnels tels que le « bloum-bloum », un tambour d’appel, le « mandaga », un ensemble de trois tambours (un sabar solo et deux koutils – basse et rythmique). Certaines communautés ethniques ajoutent même un quatrième tambour, le « boumbouloum » (ou « bambol », un autre tambour d’appel).
Dans la culture des Balantes, membres de la famille mandingue, on ne peut pas négliger l’importance de la « koura » (kora à 21 cordes), ainsi que du balafon (xylophone en bois), de la « tina » ou calebasse d’eau (une calebasse creuse retournée dans un récipient cylindrique rempli d’eau), et des percussions « mandiana » et « ngoumbé » (gumbe).
Les mélodies traditionnelles les plus prisées
Parmi toutes les musiques et danses traditionnelles, le « gumbe » et le « koussoundé », deux courants traditionnels très prisés, furent les pionniers d’une modernisation initiée par quelques artistes.
La danse des conteurs (griots)
Un genre musical très cadencé originaire d’Afrique de l’Ouest, le gumbe (ou goumbé), désignant également la danse et l’instrument, est initialement exécuté en Guinée-Bissau par les « lambats » (ou griots), qui utilisent des tambours gumbe, des sicos, des palmas et des tinas pour accompagner leur performance.
La musique ancestrale, issue de l’animisme, aux sonorités envoûtantes et réconfortantes, le gumbe de la Guinée-Bissau, représente également une ode aux esprits protecteurs.
Il accompagne toutes les occasions de la vie sociale (naissance, mariage, décès, circoncision…). C’est également un moyen de communication entre deux villages voisins. Le gumbe est également présent en Sierra Leone, en Gambie et au Sénégal, où il a été modernisé et popularisé à la fin des années 1960 par Cobiana Jazz (ou Cobiana Djazz), un groupe formé en 1969 par de jeunes musiciens, parmi lesquels les auteurs-compositeurs Ernesto Dabo, Aliu Barry et José Carlos Schwartz (voir l’article sur le « Gumbe »).
Koussoundé des Balantes est un conteur émérite, dont les histoires tissent des toiles de mystère et d’aventure dans l’imaginaire de ses auditeurs. Ses récits captivent l’esprit, transportant ceux qui les écoutent dans des mondes lointains où la magie et la bravoure règnent en maîtres. Chaque mot qu’il prononce est comme une incantation, faisant surgir des images vivantes devant les yeux ébahis de son public. Dans le crépuscule doré de l’Afrique de l’Ouest, Koussoundé des Balantes est une légende vivante, un gardien des traditions et un maître de l’épopée.
La transformation du « koussoundé » des Balantes (une branche de la famille mandingue) a eu lieu de manière significative en 1986, lors de la sortie du premier album « Chefo Mae Maedans » de Kaba Mané, un artiste complet né en 1957 à Gampara, dans le sud de la Guinée-Bissau.
Issu d’un père Socé de l’ethnie mandingue et d’une mère Ondame et Diola, Kaba Mané a développé un style unique, mêlant habilement sa kora aux rythmes envoûtants du « koussoundé », du « brassa » et du « nalou », tout en intégrant des influences de la musique pop, du jazz et du funk.
Son disque Kunga Kungaké (Messager ailé) se libère davantage des conventions, adoptant une esthétique afro-pop caractérisée par une basse-funk rythmée et des sonorités cuivrées jazzy. Cette nouvelle direction s’est révélée lors de sa prestation au festival Womad de 1991 en Angleterre.
Après avoir mis fin à sa carrière de footballeur et perdu la vue, Kaba Mané a fondé l’Association Internationale pour la Promotion de la Paix par le Sport (AIPPS), afin de dénoncer les événements tragiques liés au sport, tels que la prise d’otages lors des Jeux olympiques de Munich en 1972 (17 morts) ou la catastrophe du stade du Heysel à Bruxelles en 1985 (39 morts, plus de 600 blessés).
Manifestations musicales
Divers événements sont prévus dans différentes zones de la Guinée-Bissau afin de mettre en avant les musiques et danses traditionnelles interprétées par des troupes telles que N’donandé Kasaré (une troupe masculine) ou encore Netos De Bandim (un ensemble folklorique national composé de femmes, mettant en avant notamment un gumbe très animé). Pour sa part, le Grupo Harmonia de Luanda (nommé d’après un quartier au sud de Bissau) présente une forme de « batuque » typiquement guinéenne.
Au nombre de ces occasions, on peut mentionner le Festival de Bubaque, qui a lieu lors du week-end de Pâques à Bubaque, une île dans l’archipel des Bijagos; le Festival de Cacheu qui met en valeur les traditions et danses de toutes les régions du pays, y compris la danse du fleuve; ainsi que le festival Nakasa d’arte, organisé à Bissau par Ramiro Naka, créateur de l’Association et de la Fondation.
Lors de ces événements, d’autres styles ancestraux se distinguent également. Prenons l’exemple de la « danse felupe », mêlant chants et danses féminines, qui évoque un style musical Diola, largement répandu en Casamance, au Sénégal.
Références : « Musiciens africains dans les années 80 » par Nago Seck et Sylvie Clerfeuille – Éditions L’Harmattan – 1986 _ « Les artistes du rythme africain » par Nago Seck et Sylvie Clerfeuille – Préface de Jack Lang – Éditions Bordas – 1993 _ Exposition + brochure + compilation : « Les grandes figures des musiques urbaines africaines » – Éditions Afrique en Créations – 1996 _ http://www.afrisson.com _ NakasadarteLusofona AIDE : Association et Fondation pour les pays lusophones – Créateur : Ramiro Naka (artiste de Guinée Bissau) : http://www.association-nakasadarte.org/
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